On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre.
Où en sommes-nous ?
Fin janvier début février, un projet d’accord sur la renégociation des termes de l’adhésion du Royaume-Uni à l’Union européenne a été verrouillé par Donald Tusk, président du Conseil européen et David Cameron, Premier ministre britannique. Cet accord, une base pour les négociations qui prendront place lorsque le Conseil européen se réunira formellement le 18 février; cherche à répondre à la question suivante : comment garder le Royaume-Uni dans l’Union européenne? Pour nous, la question devrait être : comment garder le Royaume-Uni dans une Europe forte ?
D’où vient cette idée?
En tout premier lieu, nous devons nous rappeler de la position actuelle du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne. A travers cette renégociation, David Cameron souhaite principalement que la vision particulière du Royaume-Uni en tant que membre de l’UE soit reconnue et respectée.
Nous devrions lui rappeler que le Royaume-Uni a déjà obtenu plus de opt-outs que les autres pays européens, un privilège dont personne ne veut revenir dessus.
Parmi ces opt-outs :
- Le refus d’adopter l’Euro,
- La non-participation à Schengen
- Et une coopération judiciaire et sur la sécurité très limitée.
Ceci explique pourquoi les réformes que Cameron a juré obtenir par la renégociation vont apparaitre symboliques pour le people britannique : il n’y a plus rien de plus à négocier !
Et maintenant ?
Les demandes de Cameron tombent dans 4 catégories : la gouvernance économique, la compétitivité, la souveraineté, et les allocations sociales et la liberté de mouvement. Tout n’est pas négatif ou inacceptable. Par rapport à la compétitivité, les Démocrates et Libéraux européens au Parlement européen ont depuis longtemps plaidé pour une simplification de la législation européenne et « a cut in red tape », des politiques déjà mises en application à travers le Better Regulation Agenda de la Commission Juncker.
Assez juste.
L’idée d’un veto par une majorité des parlements nationaux sur une législation européenne ne suivant pas le principe de subsidiarité est aussi intéressant. Les parlements nationaux devraient être plus associés à la législation européenne et avoir une vraie dimension européenne. Mais l’efficacité d’un tel mécanisme reste une question ouverte.
D’un autre côté, nous nous opposons fortement aux autres propositions de cet accord. Le Royaume-Uni a obtenu un opt-out permanent sur l’Euro lorsque le Traité de Maastricht a été adopté en 1992 mais veut maintenant avoir son mot à dire sur les politiques économiques de l’Eurozone. Ceci n’est pas possible !
Cameron veut limiter la possibilité aux citoyens européens travaillant au Royaume-Uni d’obtenir des allocations sociales : ceci est révoltant. Alors que le Royaume-Uni est proche du plein emploi et apprécie les contributions des travailleurs migrants, ceci est une brèche claire du principe de non-discrimination.
Nous ne défendons pas et ne débattons pas de discrimination. Nous allons vers son exact opposé !
A travers ces négociations, David Cameron recherche à imposer sa propre interprétation des Traités. Pour lui, les références dans les Traités à une « Union toujours plus étroite » doivent être plus ou moins comprises comme un simple engagement à « promouvoir confiance et compréhension parmi les peuples vivant dans des Sociétés ouvertes et démocratiques (…) ce n’est pas un équivalent à un objectif d’intégration politique ». Cette tentative désespérée de limiter les compétences de l’UE constituera un coup majeur à l’essence même de l’UE et doit rencontrer une opposition ferme.
Il agit comme un pompier pyromane qui continue à reprocher à l’UE son manque d’action mais s’assure qu’elle ne peut rien faire.
Qu’est ce qui devrait être fait ?
Nous pensons que cela sera une erreur majeure de laisser le Royaume-Uni quitter l’UE : pour des raisons économiques, politiques et encore plus important, géopolitiques. Néanmoins, les Etats membres ne doivent pas accepter un accord qui réduirait les compétences actuelles de l’UE, empêcherait son fonctionnement et par conséquent ralentirait le processus d’intégration. David Cameron sait parfaitement que le Royaume-Uni a déjà assuré sa voie particulière en Europe et que les autres Etats membres ne reviendront pas en arrière.
L’objectif de cet accord devrait être de mettre dans le marbre la possibilité d’avoir différentes voies d’intégration pour les Etats, permettant à ce qui veulent plus d’intégration d’aller de l’avant, tout en respectant le droit de ce qui ne le veulent pas. Pour l’UE, c’est une question de survie et cela devrait être suffisant afin que Cameron trouve une sortie positive au problème actuel. Une réelle intégration européenne reste plus que souhaitable, quel que soit la route tortueuse promise à nous. Mais pour faire simple, cette route doit être prise par ceux qui veulent vraiment en faire partie. De telles décisions importantes doivent être prises par les Européens et pas uniquement un pays !
Vincent Delhomme (@VincentDelhomme)