De l’actualité de la CECA

La fédération des Jeunes démocrates Alsace, membre des Jeunes démocrates européens, a publié un communiqué pour les 70 ans de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), nous nous faisons l’écho de leurs propositions intéressantes :

Petit événement pour les férus d’histoire, les « eurobéats » ou plus simplement ceux qui ont un vague souvenir de leurs cours d’histoire-géographie, la Communauté européenne du charbon et de l‘acier (CECA) fête ses 70 ans. Ou plutôt, aurait fêté, car, disons-le d’emblée, la CECA n’existe plus. Elle est fondue cette communauté de 27 États européens que l’on appelle aujourd’hui Union européenne. Alors, pourquoi s’épancher sur ce vieux machin dont tant le nom « communauté » que le sujet « le charbon et l’acier » appartiennent au passé ? Parce que la CECA, c’est un esprit bien particulier qui consacre la réalité du projet européen tel que nous le connaissons.

Contrepied des révolutionnaires fédéralistes qui voulaient un État européen tout de suite et maintenant, la CECA vise à construite l’Europe par des « réalisations concrètes créant d’abord des solidarités de fait ». En résumé, plutôt que de signer une convention internationale qui interdirait la guerre, la CECA souhaite la rendre impossible : en plaçant sous une autorité commune, indépendante de ses États membres, la production de ressources indispensables pour faire la guerre, les six États européens signataires du traité ouvrent les conditions d’une paix qui perdure jusqu’à l’écriture de ces lignes.

L’idée, d’une simplicité évidente, est dès lors d’une efficacité redoutable. Certains s’y opposent, d’autres l’applaudissent, mais tous comprennent ce qui est en jeu. Sa descendante directe, l’Union européenne, pourrait bien s’en inspirer, et ce à plusieurs titres :

  • Tout d’abord, la CECA s’est construite autour d’un objectif, faire la paix, qui a débouché sur une proposition politique : créer une institution européenne chargée de gérer la production et l’écoulement de matières stratégiques. Et c’est tout. Il n’a pas été question d’incarnation politique, de guerre d’égo ou de rapport de forces entre institutions européennes. Des États volontaires se sont accordés pour déléguer une partie de leur souveraineté, le projet s’est ensuite mis en œuvre.
  • Ensuite concernant les parties prenantes : tout le monde a été invité, seuls les volontaires ont participé. C’est un enseignement fort de l’esprit de la CECA, viendront d’abord ceux qui le souhaitent, tout en laissant la porte ouverte pour les suivants. Si l’Union européenne est empêtrée dans des conflits internes, alors les États volontaires doivent s’engager et si nécessaire dépasser le cadre actuel. Les limites de l’Union européenne sont celles que les États ont bien voulues se fixer et qu’ils acceptent de respecter, on ne peut craindre de devoir les dépasser.
  • Sur les ressources, propres : la CECA prélevait directement une taxe sur les producteurs de charbon et d’acier, sans alignement préalable des taxes nationales. À l’heure des États frugaux, des sommets marathons pour s’accorder sur la contribution des États membres au budget de l’Union européenne, la possibilité pour l’institution d’assumer son financement de manière autonome parait révolutionnaire, elle ne l’était pourtant pas il y a soixante-dix ans.
  • Enfin, sur les finalités : la CECA fut conçue comme une première coopération qui en appellerait d’autres. Si l’Union européenne est une conséquence directe et une réussite majeure de la CECA, rien ne la dispose à être son aboutissement. La mécanique enclenchée par la CECA s’est figée ces dernières années. Toute révision des traités est interprétée comme un affaiblissement d’une institution pourtant critiquée, comme si de ne pas parler des limites d’un régime allait le protéger de sa chute. La CECA n’avait pas prévue l’Union européenne, elle avait en revanche prévue un avenir commun pour les Européens.

Dès lors, l’esprit de la CECA nous est bien utile. Nous, Jeunes démocrates Alsace, croyons que le projet européen sera revigoré par des actions concrètes, autofinancées, prises par des États volontaires qui s’engagent pour un avenir meilleur de leurs citoyens fait sens aujourd’hui. Alors que l’épidémie de la Covid-19 a été un moyen d’avancer ensemble, à la fois sur la gestion de la crise, mais aussi pour sa relance avec un instrument de dette commune, il convient de laisser l’imagination des citoyens et de leurs représentants libres de proposer une nouvelle étape de la construction européenne. Le lancement, au lendemain des 70 ans de la CECA, d’une plateforme de consultation des citoyens dans le cadre de la Conférence sur l’avenir de l’Europe et à ce titre une formidable opportunité dont nous devons nous saisir. Mais si le cadre se trouvait trop restreint, ou la volonté politique des 27 États membres trop tenue, alors il nous faudra prendre nos responsabilités et concevoir ensemble la prochaine étape d’un projet pour les Européens.

Résolution sur l’identité, la culture et l’éducation (Congrès YDE 2018)

Renforcer les valeurs européennes et l’identité partagée par la culture et l’éducation

Nous, Jeunes démocrates européens, considérons que les mouvements populistes et l’euroscepticisme croissants constituent une menace pour les valeurs européennes et les sociétés démocratiques. Nous considérons que la meilleure façon de relever ces défis est d’améliorer l’ouverture d’esprit et de développer la compréhension multiculturelle par le biais de l’éducation et de la culture.

Renforcer l’identité européenne commune

Nos sociétés européennes modernes sont le résultat d’une histoire commune et non le résultat d’une somme de récits nationaux uniques, nous pensons qu’il est nécessaire que les jeunes Européens prennent conscience de cette réalité. Et quels lieux seraient plus appropriés que les écoles pour assurer une transmission historique et un éveil citoyen ?

Peu coûteux et symbolique, les manuels d’histoire co-construits entre pays européens peuvent être une réponse appropriée. Reconnaissant les spécificités de chaque culture, ce manuel peut développer une perspective transnationale des relations entre les pays afin de proposer une Histoire commune et enrichie aux lycéens qui pourraient ainsi mieux comprendre chaque vision nationale.

Dans un contexte de tensions internes renouvelées sur le continent et face à l’émergence de forces politiques populistes, il est plus que jamais nécessaire de mener à bien ce projet.

Dans le droit fil de l’éducation scolaire, la Journée de l’Europe doit être un moment crucial dans l’éducation des jeunes Européens. Nous proposons de faire de cette journée une journée spéciale dans les écoles européennes, en particulier avec des événements spéciaux sur notre histoire et nos valeurs.

Améliorer la mobilité à travers l’Europe

Les taux de mobilité géographique au sein des pays de l’UE et entre les pays de l’UE sont d’environ un pour cent, ce qui est deux fois plus faible que les taux de mobilité aux États-Unis, au Canada ou en Australie.

Nous savons cependant que la mobilité géographique peut être un outil puissant pour lutter contre le chômage des jeunes et renforcer la cohésion européenne. Nous devrions également remarquer qu’aujourd’hui, les jeunes qui s’installent dans un autre pays de l’UE sont plutôt instruits et viennent de milieux favorisés, et sont moins susceptibles de souffrir de longues périodes de chômage. Notre défi est donc de développer la mobilité géographique pour tous les jeunes Européens.

Au cours des dernières décennies, l’Europe a lancé plusieurs programmes pour s’assurer que les Jeunes Européens soient en mesure d’acquérir une éducation ou une expérience professionnelle à l’étranger. L’ancien programme Leonardo, les actions Erasmus+ et Comenius en cours ont permis d’accroître la sensibilisation aux problèmes intra-européens.

Mobilité pour une courte période de temps, et abaissé les obstacles au déplacement à l’étranger pour étudier ou travailler. Mais il faut faire plus.

Nous plaidons en faveur du lancement de nouvelles initiatives à l’échelle européenne. Nous visons d’abord à accroître le soutien du programme Erasmus aux associations. Les jeunes Européens sont engagés dans de nombreuses associations pour mener et réaliser des projets dans différents domaines allant du sport à la lutte contre la pauvreté. Ces jeunes leaders devraient bénéficier davantage de l’action de l’UE pour encourager l’engagement des jeunes à travers le continent.

Deuxièmement, nous voudrions établir un cadre commun pour l’examen final de l’école secondaire afin d’initier une convergence en Europe pour l’accès à l’enseignement supérieur et à l’enseignement professionnel.

Troisièmement, nous pensons que le moment est venu de lancer un renouvellement des “classes européennes” initié par les pouvoirs publics. Davantage d’Européens devraient participer à ces cours et passer un semestre dans un autre pays européen avant d’avoir 18 ans.

Construire une politique culturelle commune pour les jeunes

Depuis 1992, la culture est une compétence européenne. Il est donc très important dans le processus de construction européenne : il permet de le considérer comme un projet global et pas seulement comme l’ajout de perspectives nationales. L’art et la culture ont un rôle important à jouer pour accroître le sentiment d’appartenance à une communauté et assurer l’intégration sociale, le développement économique, l’équité et l’inclusion. C’est pourquoi il est logique de le promouvoir à l’échelle européenne.

Il est nécessaire de rendre la culture accessible au plus grand nombre. Pour cela, d’une part, il pourrait être intéressant de relier des territoires où la culture n’est pas toujours accessible.

Tout d’abord, comme pour les capitales européennes de la culture en termes de sélection, nous pourrions imaginer des expositions itinérantes des plus grands musées européens dans des zones urbaines de taille moyenne qui n’ont pas de musées de renommée internationale et donnent ainsi un nouvel élan à la communauté artistique locale.

Parallèlement, des partenariats à long terme peuvent également être créés entre les différentes zones urbaines et les zones plus rurales, amenant ainsi des artistes de renommée internationale dans des zones qui n’y auraient pas eu accès autrement, et faisant la promotion réciproque d’œuvres qui ne l’auraient pas été autrement. Pour cela, une impulsion européenne serait pertinente.

D’autre part, nous devons admettre que l’Eurovision est actuellement le seul moment de l’année où les Européens se retrouvent côte à côte autour de leur télévision. C’est pourquoi nous pourrions imaginer la création d’un média européen dédié à la jeunesse, qui ferait prendre conscience de notre appartenance commune tout en montrant la richesse de la diversité de nos différentes nations.

Enfin, une troisième proposition pourrait être la création d’un “bon culturel” européen qui pourrait être distribué aux jeunes de 18 ans par le biais d’un système de partenariats avec différents instituts culturels leur permettant d’accéder gratuitement à une offre culturelle. Cela favoriserait l’accès aux pratiques culturelles de toutes sortes pour tous les jeunes Européens : l’opéra, le théâtre, mais aussi le cinéma et les concerts.

Ces trois propositions visent donc à sensibiliser l’opinion publique européenne à la culture, même en dehors des grands centres urbains, et à sensibiliser les jeunes à la richesse qui existe au sein de l’Union européenne.

 

Résolution sur la démocratie

Les intérêts nationaux prennent souvent le pas sur les intérêts européens communs, ce qui conduit à un manque d’unité et d’engagement en faveur d’un projet supranational solide et partagé.

En outre, la démocratie, les droits de l’homme et l’état de droit, que nous considérons comme les principaux atouts de l’Union européenne, ont été bafoués ces dernières années.

C’est pourquoi la souveraineté est devenue l’une des principales questions à traiter, c’est-à-dire le droit des citoyens de décider de leur propre avenir et de leur destin politique, économique et social. En effet, le concept de souveraineté doit être abordé conjointement avec la notion de démocratie. Nous ne pouvons accepter que les citoyens n’aient toujours pas accès à la souveraineté dans une société qui exige une plus grande participation politique et sociale. Nous nous opposons fermement à tout modèle de gouvernance qui empêche les citoyens d’y jouer un rôle actif.

En ce sens, les Jeunes Démocrates pour l’Europe défendent la souveraineté partagée entre l’Union européenne et les citoyens dans un cadre de gouvernance à plusieurs niveaux. En fait, la démocratie étant l’un des principaux piliers de la légitimité du projet européen, les Jeunes Démocrates pour l’Europe montrent leur fervent engagement envers les valeurs démocratiques de l’UE : égalité, inclusion, diversité, cohésion, tolérance et respect.

 

CETA, leçons à tirer d’un échec

Le CETA (ou accord économique et commercial global (AECG)), l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, a finalement été signé le 30 octobre dernier après plusieurs jours d’incertitude dûs à l’opposition du Parlement Wallon. Les Jeunes Démocrates Européens saluent cette signature mais regrettent cet épisode qui laisse encore l’UE affaiblie. Trois leçons peuvent en être tirées.

Il ne faut pas sous-estimer le besoin de démocratie, d’ouverture et de transparence mais au contraire y répondre. Donald Tusk lui-même a admis que le débat déclenché par la Wallonie a été «profitable» en permettant de divulguer des «informations crédibles» aux citoyens. La Commission européenne doit assumer ses responsabilités en tant que «gouvernement de l’UE» et mieux expliquer ses projets aux citoyens européens, notamment dans les médias, comme le ferait chaque gouvernement lors de l’élaboration de lois nationales. Une situation aussi dramatique aurait également pu être évitée si la Commission européenne avait engagé un dialogue avec la Wallonie plus tôt. Il faudra en tenir compte lors des prochaines négociations.

Toutefois, ce besoin de transparence devrait être adressé au niveau européen, en associant plus étroitement le Parlement européen aux négociations, et l’opinion publique le plus tôt possible. Chacun des traités signés par l’Union européenne ne peut avoit l’obligation d’être ratifié par près de 40 parlements nationaux ou régionaux, un seul refus risquant de compromettre l’ensemble du processus. Il en va de la crédibilité de l’Union en tant qu’acteur mondial. Des compétences plus fortes doivent être accordées à l’UE et au Parlement européen en matière de politique commerciale.

Le rejet des accords de libre-échange provient non seulement du manque de transparence des négociations, mais aussi du doute quant aux avantages du libre-échange lui-même. Nous croyons que le libre-échange apporte  de la richesse et des opportunités aux populations, mais, qu’en dépit de ses avantages, le libre-échange a aussi ses perdants. Des instruments européens de défense commerciale doivent donc être mis en place. Si l’Europe et ses États membres ne construisent pas un cadre plus protecteur, le message populiste risque de prendre le dessus. Le libre-échange ne peut pas être le seul horizon politique offert aux citoyens européens.

Picture: European Parliament AudioVisual Department 

Un pass InterRail gratuit pour les jeunes Européens : une proposition mal orientée

Suite à l’appui récent des députés européens à une modification du budget de l’Union européenne qui garantirait le financement de cette initiative, les Jeunes Démocrates Européens expriment leur réticence vis à vis de cette proposition.

Violeta Bulc, Commissaire européenne chargée des transports, a récemment déclaré au Parlement européen qu’elle était prête à soutenir l’idée d’offrir gratuitement des pass InterRail à tous les jeunes adultes âgés de dix-huit ans, suscitant une vague d’enthousiasme parmi les députés européens et les responsables bruxellois. Ces billets, qui permettent à leurs détenteurs de voyager en train librement en Europe pendant un certain nombre de semaines, sont rapidement devenus depuis leur création des objets familiers pour les jeunes Européens. L’objectif d’une telle mesure est clair: améliorer la mobilité des jeunes et renforcer le sentiment européen parmi les nouvelles générations. Toutefois, si ce projet peut paraître attrayant, nous ne le considérons ni comme un instrument légitime, ni comme un moyen efficace de lutter contre l’euroscepticisme et d’accroître la mobilité des jeunes.

D’abord et avant tout, mettre en œuvre cette idée serait extrêmement coûteux. Les estimations varient de 1,5 à 3 milliards d’euros, soit entre 1 et 2% du budget de l’UE, à un moment où ce budget est précisément l’objet de négociations houleuses et se trouve soumis à une pression plus forte en raison de l’impact financier du Brexit. Quel programme sera amputé pour financer ce généreux plan ? Ces questions restent en suspens.

Ce n’est pas que le renforcement de l’identité européenne ne vaille pas quelques milliards, cela ne fait aucun doute. Mais on peut douter qu’offrir des billets InterRail soit le meilleur moyen de relancer l’amour pour l’UE parmi les jeunes. Les voyages fréquents à travers l’Europe sont déjà une réalité pour nombre d’entre eux précisément grâce à InterRail et aux vols low cost. Cet argent serait mieux utilisé pour aider le programme Erasmus dont le financement a été menacé ces dernières années et qui reste inaccessible à de nombreux étudiants. Cet argent pourrait également être utilisé pour le programme d’apprentissage Erasmus, présenté par notre eurodéputé Jean Arthuis.

Mais cette idée est aussi problématique sur le plan politique. Est-ce vraiment le rôle d’un gouvernement d’offrir des voyages gratuits avec l’argent des contribuables? Et même si c’était le cas, serait-ce le rôle de l’Union européenne? Si quelque chose doit être fait pour aider les moins favorisés à découvrir leur continent, il semble que les gouvernements nationaux soient parfaitement capables et plus à même de mener une telle politique. À un moment où le ressentiment pour l’Union atteint des niveaux records, où celle-ci est considérée comme une institution hors-sol et dépensière,  il n’est pas utile de donner raison à ses détracteurs.

De plus, l’UE dispose de meilleurs outils pour rendre les déplacements plus faciles et moins coûteux pour tous les citoyens européens. Il pourrait poursuivre l’ouverture du réseau ferroviaire européen à la concurrence, en particulier les lignes internationales, actuellement bloquée. Si l’UE cherche à accroître la mobilité dans son ensemble, elle devrait continuer à abattre les frontières sur le continent.

Ce projet est simplement démagogique et clientéliste. Il n’est pas bon de chercher à acheter l’amour et le soutien des électeurs avec des cadeaux. Il est ridicule de s’attendre à obtenir le respect des jeunes en leur offrant un voyage pour explorer les merveilles de l’Europe. Les jeunes sont parfaitement capables de comprendre rationnellement pourquoi l’UE est si importante dans leur vie et pour leur avenir.

L’UE est une histoire extraordinaire qui a fait plus que n’importe quelle autre institution pour relier les peuples européens, et c’est précisément pourquoi elle devrait abandonner cette idée qui sape sa crédibilité.  Nous croyons que des solutions à long terme et des changements profonds dans les politiques de l’UE sont le seul moyen d’apporter les moyens nécessaires à la jeunesse européenne pour gagner son autonomie et adopter son identité européenne.

Vincent Delhomme

Cet article est la traduction d’un article en anglais initialement publié sur le blog du Collège d’Europe par notre Secrétaire Général : https://blog.coleurope.eu/2016/10/14/free-passes-for-interrail/

Picture: MSc Utrecht

 

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